Un angora que sa maîtresse nourrissait de mets délicats ne faisait plus la guerre aux rats ; et les rats, connaissant sa bonté, sa paresse, allaient, trottaient par-tout, et ne se gênaient pas. Un jour, dans un grenier retiré, solitaire, où notre chat dormait après un bon festin, plusieurs rats viennent dans le grain prendre leur repas ordinaire. L’ angora ne bougeait. Alors mes étourdis pensent qu’ ils lui font peur ; l’ orateur de la troupe parle des chats avec mépris. On applaudit fort, on s’ attroupe, on le proclame général. Grimpé sur un boisseau qui sert de tribunal : braves amis, dit-il, courons à la vengeance. De ce grain désormais nous devons être las, jurons de ne manger désormais que des chats : on les dit excellents, nous en ferons bombance. à ces mots, partageant son belliqueux transport, chaque nouveau guerrier sur l’ angora s’ élance, et réveille le chat qui dort. Celui-ci, comme on croit, dans sa juste colére, couche bientôt sur la poussiére général, tribuns et soldats. Il ne s’ échappa que deux rats qui disaient, en fuyant bien vîte à leur tanière : il ne faut point pousser à bout l’ ennemi le plus débonnaire ; on perd ce que l’ on tient quand on veut gagner tout. Claris de Florian
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