Le petit gardon s'endort dans la rivière. Il est tout triste en pensant à ses cousins les poissons d'eau de mer. Il les envie tellement, eux qui ont des coussins d'algues pour se reposer, une mer pour les bercer, du sel pour les embrasser. Le gardon pleure. Il veut des vagues pour le consoler, des bras de mer dans lesquels se lover. Il voudrait pleurer sans que l'eau n'en devienne plus amère. Il voudrait vivre au rythme des marées, insouciant sous la protection de la lune. Il voudrait se laisser aller au grés des courants, visiter des pays lointains, ceux dont lui a parlé sa mère et où paraît-il, les oiseaux ont des écailles et les poissons des plumes.
Le gardon voudrait sortir du lit de la rivière. Pour cela il lui suffirait juste de se réveiller et de se lever Pour cela il lui suffirait d'entendre son réveil sonner Pour cela il lui suffirait d'avoir des oreilles Pour cela il lui suffirait de ne pas être un poisson.
Mais s'il n'était pas un poisson le problème ne se poserait pas. Alors la seule solution est de rêver. Rêver que la rivière soit prise de désespoir et se jette dans la mer.
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