Au début, il fut facile d’avancer sans penser. Une colère farouche m’aveuglait. Mais peu à peu, mes idées se placèrent et chaque pas fut une pierre supplémentaire jetée dans mon cœur. Boon n’avait pas failli.. Il m’avait aidé à récupérer ma boule à rêve. Il avait été un ami de valeur… Pourquoi m’étais-je laissé emporté par une telle colère ? Pourquoi n’avais-je pas essayé de l’écouter ? Je me laissai tomber sur le chemin de galets et pris ma tête entre mes mains. Je sortis ma boule à rêves de ma besace et plongeai à nouveau mon regard dans ses flots rouges. Baltyr, à nouveau, émergea du torrent de lumière, toujours inerte, au sol. N’aurai-je pas dû faire confiance à Boon. Avais-je le droit de le laisser seul, lui, si fragile ? Peut-être qu’on lui tendrait un piège, à lui, si confiant et si bon ? Si bon… bien plus que moi… J’avais mis en doute son amitié alors que je n’avais jamais douté de lui auparavant. C’était à n’y rien comprendre ! Qu’aurait pensé de moi ma fée-jonquille ? Comment aurait-elle agi ? Oh, je n’osais même pas y penser… Je refoulai les larmes qui me piquaient le nez. Je me levai et fis un pas vers le gué que je voyais à présent au loin. Mais mon cœur battait trop fort dans ma poitrine et, sans tergiverser plus, je me mis à courir pour essayer de rattraper Boon. Ce ne fut pas très long de le rejoindre. Il marchait d’un pas lourd, la tête baissée, le long de la rivière. Lorsqu’il entendit mes pas, il se retourna, ouvrit de grands yeux et se jeta dans mes bras. Pas une remarque, pas un reproche. Boon était vraiment un petit être exceptionnel. Je mis un genou à terre pour être à sa hauteur et lui demandai, avec gravité : - Boon, dis-moi que Cléia peut attendre… Boon prit ma main entre les siennes, ferma les yeux un court instant, et son sourire de chat au visage, il me répondit : - Cléia, comme petit oiseau dans cage, houp. Seule et triste, mais pas en danger. - Alors, je veux bien te croire. Et je veux bien que nous tentions de libérer Baltyr. Sais-tu par où aller ? Tu as parlé de géants des sables tout à l’heure… Il désigna notre rive, mais à l’opposé du gué vers lequel je me dirigeais, et, ce qui m’inquiétait le plus, c’est que Boon me dit que le seul chemin qui menait au sentier des géants longeait la rivière des Lobasta. .
- Par là, le chemin des géants. Houp, houp. - Et bien il va falloir se faire petit. Les Lobasta ne sont pas les créatures les plus hospitalières… Je jetai un regard vers le gué, que l’on distinguait encore d’ici. Mon cœur se serra. Je m’éloignais de Cléia et je retardais délibérément sa délivrance Nous marchâmes un moment en silence. - Boon, connais-tu les géants ? - Houp, houp… Mauvais, mauvais, dangereux… - Bon… Nous voilà rassurés… Allons, mettons-nous en route. Plus vite nous aurons trouvé Baltyr et plus vite nous pourrons sortir Cléia de sa cage ! Au bout d’un certain temps, je repris la parole : - Boon, je te demande pardon, pour tout à l’heure. Je n’aurais pas dû… - Fini ! Lullaby et Boon, amis, pour de vrai. Pas de pardon. Sans doute un vilain enchantement… me coupa le petit être bleu. Et c’est côte à côte que notre chemin se ferait.
Je vais vous laisser un petit instant. Il me faut aller au poulailler. Je vais voir si ces dames ont bien travaillé et m’ont donné des œufs ! A plus tard !
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