Oû douet, oû douet La lessivyire d'aveu sen bateus Oû douet, oû douet Batouésait, la man blleue
La nuit était tombée Je m'en revenais de Caen La nuit comme un manteau épais Enveloppait les chemins d'argent
Le dos courbé Le front brillant
Au lavoir une ombre s'affairait Battait, frottait, essorait Au lavoir comme une noire fée Une ombre en silence blanchissait
Le dos courbé Les mains violacées
"Lavandière, dur est ton labeur Le linge gèle dans ton panier Lavandière comme tes soeurs Le froid t'ôtera la santé"
Ton dos courbé Ta poitrine enflammée
"Monsieur voudriez-vous m'aider, Votre coeur est bon, votre bras fort Monsieur comme un loyal chevalier Epargnez-moi tous ces efforts"
Votre dos courbé Votre main d'acier
Un drap de cendre elle me désigna Maculé de larges taches de sang Un drap comme un lourd rideau d'effroi Elle me tendit tranquillement
Mon dos courbé Mes mains affolées
"Lavandière quel est ce secret, Quel crime laves-tu en silence ? Lavandière comme un témoin muet Tes yeux se perdent en coupables errances."
Ton dos courbé Ta bouche fermée
"Monsieur permettez-moi de taire ces faits Et de dissimuler d'indicibles douleurs, Monsieur comme une enfant hébétée Je porte de lourds secrets en mon coeur"
Mon dos courbé Ma bouche muselée
Dans l'eau glacée le rouge drap j'ai plongé Et je vis le lavoir rapidement s'empourprer Dans l'eau, comme l'encre s'épand sur le papier Le sang par quelque maléfice se déversait
Mon dos courbé Ma bouche apeurée
Le drap devint immaculé sans que je ne fis rien Et la lavandière s'évapora sous mes yeux Le drap comme l'innocence était d'un blanc sans fin Et la lavandière était un spectre malheureux
Son dos courbé Son corps absent Son âme blessée Son repos elle attend
Oû douet, oû douet La lessivyire d'aveu sen bateus Oû douet, oû douet Batouésait sen linceu.
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