17 février 1454. Lille : «Le banquet du faisan» donné par Philippe le Bon. L'année qui suit la prise de Constantinople le pape et l'empereur appellent à une nouvelle croisade : c'est, pour les seigneurs de Bourgogne et de Flandres, l'occasion de fastueuses réunions. Celle du duc de Bourgogne surpasse tout. Dans la grande salle de son palais, décorée des Travaux d'Hercule, des tables ont été dressées et le spectacle commence. D'un gigantesque pâté surgit un orchestre de vingt-huit musiciens,
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tandis qu'un éléphant richement paré porte l'écuyer Olivier de la Marche, costumé en femme endeuillée : c'est la Sainte Eglise capturée par les Infidèles. On présente au prince un faisan vivant, à collier d'or,Philippe le Bon et toute sa suite jurent sur l'oiseau noble de se porter au secours de la chrétienté d'Orient. Olivier de La Marche nous en a laissé une longue relation. Alexandre se Saint-Léger en fait la description que voici : "la salle, très vaste, était décorée de tapisseries qui représentaient les travaux d'hercule. Trois tables y étaient dressées et sur chacune d'elles figuraient d'immenses surtouts et entremets, qui étaient des merveilles de bizarrerie et de luxe. "Sur l'une des tables, on remarquait une église où se trouvait une cloche et quatre musiciens ; un petit enfant nu sur un rocher qui jetait de l'eau de rose continuellement ; un vaisseau garni de tous ses agrès et monté par des marins ; une fontaine et une prairie avec un Saint-André. "Sur la plus longue, il y avait neuf surtouts : " Ung pasté, dedans lequel avoit vingt-huit personnages vifz, jouant de divers instruments, chascun, quant leur tour venoit" ; un château de Mélusine, des tours duquel jaillissait de l'eau d'orange qui tombait dans les fossés ; un moulin à vent ; un tonneau contenant deux breuvages, et sur ce tonneau, un personnage tenant à la main un billet avec ces mots : "Qui en veut en prenne" ; un désert, où un tigre lutte contre un serpent ; un sauvage monté sur un chameau ; un chevalier et une dame sous une treille, riant d'un homme qui bat un buisson plein d'oiseaux ; un fou sur un ours ; un lac entouré d'habitations et parcouru par un navire à voiles. "Sur la dernière table, la plus petite, on voyait une forêt remplie d'animaux féroces qui se mouvaient automatiquement ; un lion attaché à un arbre, devant lequel un homme bat un chien ; un colporteur, la hotte pleine de marchandises. "Un haut buffet était chargé de vaisselle d'or et d'argent, de vases de cristal garnis d'or et de pierreries. Vers le milieu de la salle, contre la muraille, une statue de femme jetait de l'hypocras (par la mamelle droite; près d'elle, tenu par une chaîne de fer,se trouvait un lion vivant ; au dessus du lion, on pouvait lire cette inscription ;"Ne touchez à ma dame". "Des intermèdes variés interrompaient de temps en temps le banquet (dans chaque service entraient quarante-huit espèces de mets) ; airs exécutés par les musiciens du pâté ou par les orgues de l'église du surtout ; entrée d'un lutin monté sur un sanglier et portant en équilibre sur la tête un homme qui avait les pieds en l'air ; entrée d'un dragon volant ; scène de chasse au faucon, etc.
(la suite demain.....)
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