La Mésopotamie, berceau de l’écriture
Les plus anciens signes d’écriture ont été retrouvés essentiellement à Uruk (actuelle Warka, en Irak), ancienne capitale du pays de Sumer ; on les a datés d’environ 3300 avant J.-C. L’apparition de l’écriture coïncide avec l’essor des villes, dans des sociétés en mutation, où viennent de pénétrer l’invention de la roue et la technique du cuivre moulé et qui possèdent déjà tout un répertoire de signes et de symboles dans leurs arts plastiques.
Il y a plus de cinq mille ans, coexistaient de part et d’autre du Tigre deux pays : Sumer, entre le Tigre et l’Euphrate et Élam, à l’est du Tigre, dont la capitale était Suse (en Iran aujourd’hui).
Organisées sous l’autorité d’un souverain, les populations étaient urbanisées et composées d’administrateurs, de marchands, d’artisans, de paysans et de bergers, qui pratiquaient tout type d’échanges, administratifs ou commerciaux.
L’écriture est née surtout de la nécessité ressentie par ces hommes de conserver la trace de leurs échanges. Ce sont les Sumériens qui finalisent le système, les Élamites n’allant pas au-delà de leurs propres pictogrammes et empruntant plus tard le modèle sumérien pour noter leur langue. Des calculi à l’écriture cunéiforme : l'homme a su compter avant de savoir écrire
Pour enregistrer leurs opérations comptables, Élamites et Sumériens utilisent un système de jetons modelés dans l’argile (calculi), de taille et de forme différentes selon la valeur convenue, portant parfois des indications de nombre sous forme de traits incisés.
Ces jetons sont glissés dans une sphère creuse en argile façonnée au préalable autour du pouce, sur laquelle est apposé un sceau cylindrique identifiant le propriétaire. Ainsi, par exemple, si la bulle de terre contient le dénombrement d’un troupeau confié à un berger, lorsque celui-ci le ramènera il suffira de briser la bulle pour vérifier qu’aucune bête ne manque.
Vers 3300 avant J.-C., on appose sur la sphère, à côté du sceau, un résumé de son contenu : on n’est plus obligé de la casser au moment du contrôle. Les jetons numériques deviennent alors inutiles, les sphères s’aplatissent, se transforment en tablettes et les premiers chiffres apparaissent : ce ne sont encore que des encoches plus ou moins fines, plus ou moins grandes selon la valeur attribuée, des empreintes en forme de cône ou de cercle.
Une véritable écriture apparaît alors qui continue à se perfectionner sans cesse, transcrivant au plus près la langue sumérienne ; puis elle s’adapte à des langues étrangères : sémitique comme l'akkadie
indo-européennes comme le hittite,
caucasiennes comme le hourrite...
Simples dessins représentant schématiquement les marchandises ou objets de la transaction les premiers pictogrammes ont qu’une fonction de « signe-image ».
Ces pictogrammes sont associés les uns aux autres pour exprimer une action ou une idée, par exemple l’association de celui de l’oiseau et de celui de l'œuf pour écrire « fécondité » : c’est un idéogramme ou « signe-idée ».
Vers 3000 avant J.-C., des pictogrammes ou des idéogrammes sont également utilisés pour leur valeur phonétique, un signe correspondant à une syllabe ou « signe-son ».; l’écriture est ainsi, en quelque sorte, mise en conformité avec la langue.
Les signes vont basculer de quatre-vingt-dix degrés vers la gauche et le graphisme change : les lignes courbes, difficiles à tracer sur l’argile molle, sont décomposées en lignes droites que le scribe ne grave plus, mais imprime à l’aide d’un calame, tige de roseau à bout triangulaire, laissant des empreintes en forme de coins : c’est la graphie cunéiforme (du latin cuneus: coin, clou), née à Sumer. évolution du signe cunéiforme représentant un homme
Ainsi se perfectionnant sans cesse, l'écriture transcrit au plus près la langue sumérienne : en évoluant du « signe-image » au « signe-son » et en devenant cunéiforme, l’écriture passe de la notation aide-mémoire à l’enregistrement de contrats, de documents économiques, administratifs, religieux, voire même de textes littéraires et poétiques, telle la fameuse épopée de Gilgamesh.
Dès lors, à partir de la Mésopotamie, le cunéiforme se répandra, dès le IIe millénaire, dans tout le Proche-Orient :
du golfe arabo-persique à la Méditerranée,
de l’Iran au Caucase,
jusqu'à l’Asie Mineure et la Palestine.
Le système cunéiforme, sous l’emprise de scribes de plus en plus savants, se complique et s’alourdit. Il commence alors à régresser, tandis qu’apparaissent, ici et là, d’autres façons d’écrire.
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