Autres noms : Gronda sporgente, Gargola, Gargoyles, Wasserspeir.
Depuis des siècles, du haut des toits et des pinacles, tantôt bien visibles, tantôt blotties dans l'ombre, les gargouilles, grotesques et marmousets épient nos faits et gestes dans l'immobilité et le silence de la pierre. Que vous les nommiez "gronda sporgente", "gargola", "gargoyles", "wasserspeir" ou "gargouilles", leur fonction première est d'écarter des murailles, l'eau qui ruisselle des toits, et leur allure inquiétante protège l'édifice des forces du Mal qui l'entoure. Les gargouilles sont chargées de mystère et font voyager notre imagination.
Les gargouilles apparaissent dès l'époque romaine. Elles sont alors en terre cuite, elles le seront de bois puis de pierre. Elles voisinent déjà avec d'autres figures monstrueuses et fantastiques, mi-humaines, mi-animales naissant d'enroulements de feuillages, souvenir des coutumes païennes de "l'homme vert". Ces dernières prennent le nom de grotesques ou de chimères à la fin du XVè siècle avec la découverte des décors peints de la Domus Aurea du Ier siècle avant J.-C. (Maison Dorée de Néron).
Les gargouilles connaissent leur apogée au Moyen-Age, en pleine période gothique où elles fleurissent tant sur les édifices religieux que civils. D'abord en bustes trapus et peu nombreuses, elles se multiplient par la suite, les corps se font plus élancés, parfois entiers, s'affinent et plongent dans un imaginaire médiéval débridé. Elles sont sculptées en forme de personnages vomissants, moines, monstres et animaux fantastiques. Elles semblent presque échapper à l'idéalisation picturale gothique et relèvent parfois plus d'une continuité romane.
Bien que la plupart du temps commandité par le milieu ecclésiastique, les artistes jouissent d'une étonnante liberté d'expression, et l'on peut s'étonner de trouver certaines représentations ainsi accrochées à la paroi d'une église. Au Moyen-Age, difformité physique est synonyme de difformité mentale, maladie est synonyme de diablerie. L'âme avilie se présente nécessairement par un aspect physique démoniaque, difforme et contre-nature. Les gargouilles expient-elles leurs péchés en vomissant l'eau purificatrice ? Leur orientation en tous points cardinaux forme-t-elle un cercle magico-religieux préservant la béatitude sereine du lieu saint en repoussant les forces du mal vers l'extérieur?
Localisation : La Gargouille est une forme de dragon d'eau originaire de France.
Légendes : Tous les dragons ne crachent pas des flammes ou des vapeurs nocives ; certains répandent des torrents d'eau, terriblement destructeurs également. En l'an 520, la ville de Rouen se trouva menacée, non par une armée étrangère, ni même par la peste ou une quelconque épidémie mais par un fléau infiniment plus dangereux, qui avait surgi un matin des eaux de la Seine.
St-Romain et la Gargouille. Une grande tête couverte d'écailles était d'abord apparue, portée par un long cou reptilien. Elle avait un museau étiré, de puissantes mâchoires et de lourdes arcades sourcilières surmontant des yeux qui luisaient comme des pierres précieuses. Tandis que l'eau ruisselait sur ses épaules, le corps colossal d'un dragon-serpent avait surgi du fleuve . Il était recouvert d'un fin réseau de pâles écailles, à l'aspect glauque, et il agitait violemment les deux nageoires qui lui tenaient lieu de membres .toute la vallée de la Seine sous le raz-de-marée de ses projections. La bête tuait aussi de nombreuses personnes, soit en les dévorant, soit en les noyant quand elles tentaient de lui échapper. La situation devint bientôt si grave que saint Romain, l'archevêque de Rouen, décida, pour sauver ses ouailles, d'aller lui-même affronter le monstre dans son antre, une grotte située sur les rives de la Seine.
Quand il demanda à ses concitoyens de l'accompagner dans sa périlleuse mission, tous se dérobèrent, à l'exception d'un homme qui venait d'être condamné à mort. N'ayant rien à risquer qu'une vie déjà perdue, celui-ci accepta de se joindre au prélat pour l'aider à venir à bout du dragon. A peine les deux hommes eurent-ils atteint la grotte que la Gargouille apparut, la gueule grande ouverte, prête à déverser une cataracte pour les noyer. Mais, Gargouille alors même que le flot mortel montait déjà dans la gorge de l'animal, saint Romain fit un pas décidé en avant, leva les bras au-dessus de sa tête et fit le signe de la croix avec ses index tendus. Le terrible dragon s'effondra aussitôt, une rigole inoffensive s'écoula à la place du torrent impétueux, et toute sa fureur fut alors dissipée. Sa transformation fut si totale qu'il laissa même l'archevêque lui passer son étole autour du cou, constituant une sorte de laisse, ce qui permit au condamné de le ramener sans dommage à Rouen. Dans la ville, une foule en colère l'accueillit, manifestant bruyamment sa rage, bien décidée à anéantir le monstre qui l'avait si longtemps terrorisée. La Gargouille fut finalement tuée, non par l'eau, mais par le feu, et il ne resta bientôt plus d'elle qu'une poignée de cendres qui furent jetées dans la Seine . Mais son souvenir ne s'effaça jamais entièrement des mémoires. On retrouve aujourd'hui encore, au fronton d'innombrables églises d'Europe, des sculptures représentant des monstres grotesques, surmontant barbacanes et chantepleures, par où s'échappe l'eau des gouttières, et qui portent le nom de gargouilles.
Le condamné qui avait aidé saint Romain à capturer le monstre fut gracié et libéré ; depuis ce jour, et pendant de longues années, les archevêques de Rouen furent autorisés à gracier un condamné par an, le jour de l'Ascension. http://pages.videotron.com
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